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Enseigner les langues vivantes et se former

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Enseigner les langues vivantes et se former

Développer une attitude positive et confiante envers l'enseignement des langues : approches interculturelle, actionnelle, T.P.R.

Au cours de l’histoire de l’enseignement des langues en France, la mobilité internationale croissante des personnes ainsi que l’augmentation des échanges internationaux ont fait évoluer les compétences à acquérir dans ce domaine. Les compétences de communication et de socialisation, tenant compte à la fois d’une langue mais aussi de son environnement social et culturel, sont devenues essentielles dans le domaine éducatif, pour découvrir l’autre dans sa globalité, pour apprendre à communiquer et ainsi appréhender sereinement l’inconnu, pour éduquer à la diversité. « Une éducation interculturelle viserait, d’une part, à faire supporter aux élèves l’insécurité causée par l’inconnu ; d’autre part, elle devrait les conduire à généraliser les expériences de contact avec la culture étrangère, sans tomber pour autant dans le piège du stéréotype ». (Maddalena DE CARLO, L’interculturel, CLE International, Didactique des Langues Etrangères).

L’éducation aux langues et cultures est désormais communicationnelle et interculturelle, afin que chaque apprenant soit reconnu dans sa dimension personnelle, individuelle et sociale. «L’enjeu n’est pas tant la connaissance mais la relation entretenue avec autrui, relation qui renvoie nécessairement à l’identité propre de chacun, identité dans la relation, dans la communication et non pas dans l’isolement et le repli ». (Martine ABDALLAH-PRETCEILLE, L’éducation interculturelle, Que sais-je ? PUF, n°3487, 2005) ?

1. La formation

Un des enjeux majeurs de la formation des enseignants consiste à développer une attitude positive et confiante envers l’enseignement des langues. Pour cela, il est actuellement nécessaire de partir de leurs représentations des langues et des cultures, ainsi que de l’enseignement.
Communiquer dans une langue étrangère signifie réussir à comprendre l’autre et à se faire comprendre : on considère ainsi l’erreur comme partie intégrante de l’apprentissage. On invite à s’exprimer dans la langue sans crainte ni complexe.

Au cours de la formation, il est important de :

  • donner l’envie de découvrir une langue et une culture étrangères, et de l’enseigner ;
  • faire découvrir que toute personne est capable de s’exprimer dans une langue étrangère ;
  • faire percevoir de manière simple et concrète les différents niveaux d’exigence, en référence au Cadre Européen Commun de Référence ;
  • inciter à une formation tout au long de la vie et à la mobilité ;
  • faire vivre la formation linguistique à travers sa dimension culturelle et interculturelle ;
  • inviter à l’innovation pédagogique et à l’ouverture culturelle (cf. référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l’éducation) ;
  • développer les articulations  1er-2nd degré ;
  • travailler en équipes, en réseaux, dans une démarche de projet (projet culture et langue) ;
  • viser la maîtrise d’au moins une langue vivante étrangère au niveau B2 du CECRL.

2. Enseigner les langues

2.1 Développer des attitudes positives chez les élèves

Enseigner les langues  aujourd’hui, c’est, dès le plus jeune âge, donner le goût, éveiller la curiosité des apprenants, leur donner envie d’apprendre et de découvrir, ouvrir à la musicalité d’une autre langue, aux sonorités différentes, aux rencontres possibles, et enfin prendre confiance en soi pour oser s’exprimer. Aussi la posture de l’enseignant se caractérisera-t-elle par un regard positif et une bienveillance constructive (cf. P4 référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l’éducation).

Enseigner les langues aujourd’hui, c’est aussi découvrir d’autres cultures avec leurs spécificités et leurs différences afin de mieux comprendre la sienne et d’accepter la diversité, car apprendre la langue de l’autre, c’est aussi apprendre à le connaître et à le respecter.

Quel que soit l’âge de l’élève, la motivation pour cet apprentissage est favorisée par l’implication par le corps, par le jeu, par la multiplicité et la variété des activités, par l’interdisciplinarité et la transdisciplinarité, cours en langue étrangère. En effet, enseigner une langue à travers des rituels en classe, des situations concrètes de la vie quotidienne permet de donner sens à cet enseignement.

2.2 Les objectifs prioritaires

Le deuxième pilier du Socle Commun, pratique d’une langue vivante étrangère, vise à ce que l’élève soit capable de communiquer.

L’enseignant aura pour objectif, «par une pratique régulière et par un entraînement de la mémoire», de :

  • « développer des comportements indispensables : curiosité, écoute, attention, mémorisation, confiance en soi dans l’utilisation d’une autre langue » (B.O. 2008);
  • éduquer l’oreille, faire entendre des composantes sonores de diverses langues : les élèves s’imprégneront de l’accentuation, des mélodies, des rythmes propres à la langue ;
  • développer les cinq compétences de communication langagières (écouter et comprendre, parler en continu, réagir et dialoguer, lire, écrire), en donnant la priorité à l’oral ;
  • de faire acquérir des connaissances linguistiques (lexique et structures linguistiques) indissociables des connaissances culturelles. 

L’élève devra avoir acquis les compétences langagières nécessaires à la communication élémentaire définies par le niveau A1 du Cadre Européen Commun de Référence en Langues en primaire, A2-B1 en collège et B1-B2 en lycée.

3. Langues et cultures : éveiller, enseigner, éduquer

3.1 Méthodologie

Une approche interculturelle

L’approche interculturelle permet de connaître les autres, les accepter tels qu’ils sont et pour ce qu’ils sont, être réciproquement ouverts à l’autre tout en gardant son identité culturelle, son appartenance et ses racines, tout en étant disposé à changer progressivement de posture par la rencontre, la fréquentation des autres, la découverte de leurs coutumes et modes de vie. Il s’agit d’apprendre à relativiser, à se distancer par rapport à son propre système de références, à se décentrer.

Dans cette dimension, la langue n’est pas travaillée en tant que telle, mais utilisée au service d’une action  permettant de développer une compétence de communication. Cette approche est à la fois communicative et interactionnelle.

Une approche actionnelle

Depuis que les programmes scolaires sont basés sur le Socle Commun, la perspective de l’apprentissage, de l’enseignement et de l’évaluation des langues vivantes est de type actionnel. En effet, l’apprenant est considéré comme un acteur social qui doit accomplir une tâche selon des circonstances et un environnement social donné. Non seulement l’acte de paroles sera pris en compte, mais aussi et surtout le contexte socioculturel, ainsi que l’acte d’agir. Cette tâche dite « communicationnelle » permet d’associer le dire et le faire.

Il s’agira donc pour l’enseignant de :

  • mettre en place des situations de communication variées, concrètes, aussi authentiques que possible, et ludiques, au travers par exemple d’expressions scéniques,  d’albums de littérature… ;
  • d’élaborer un projet langue, en lien avec le projet d’école ;
  • de développer la dimension inter et pluridisciplinaire.

CECRL page 16

Une démarche possible - T.P.R. : « Total Physical Response », learning another language through actions

Cette méthode, développée par James  J. ASHER, rejoint l’approche actionnelle car elle associe le dire et le faire pour une meilleure mémorisation. Elle se base sur la communication verbale et non-verbale, sur le sentiment de réussite et de non difficulté des apprenants et sur le développement de la confiance en soi, car un délai est accordé à la production verbale : l’apprenant communique par le corps avant de s’exprimer à l’oral. Cette approche est donc considérée comme kinesthésique, puisque l’apprenant répond physiquement à la langue parlée. L’importance du corps, de la gestuelle, du mouvement, du toucher, du regard, de l’odorat, de l’écoute, autrement dit des 5 sens, dans l’apprentissage favorise donc la compréhension, la mémorisation, l’intériorisation.

Une évaluation résolument positive

Une évaluation formative et une évaluation positive seront privilégiées : l’investissement des apprenants dans leur propre apprentissage en langue, l’utilisation d’outils d’auto-évaluation et de co-évaluation devront être encouragés. Des outils d’évaluation tels que le portfolio des langues et des cultures pourront aider à motiver l’apprenant et l’encourager à poursuivre son apprentissage : cet outil prend en compte les apprentissages réalisés et les compétences développées à travers des projets Cultures et Langues, les contacts ou séjours à l’étranger : dans le cadre de l’institution scolaire ou au niveau personnel.

Pour l’évaluation en langue, le CECRL est un guide qui hiérarchise les compétences en langues selon une échelle de six niveaux (du niveau A1 au niveau C2). La maîtrise du niveau A1 correspond au niveau requis pour la fin de l’école élémentaire et celle du niveau A2 pour l’obtention du Brevet des collèges. Une certification vient attester du niveau acquis. Elle doit apparaître dans le Livret Personnel de Compétences.

3.2 Les référents

L’enseignant en langue a à sa disposition plusieurs outils et documents de référence qui pourront l’aider à mettre en place un enseignement des langues.

Le CECRL, Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues conçu par le Conseil de l’Europe constitue la référence fondamentale pour l’enseignement des langues. Cet enseignement se caractérise par cinq types d'activités : la compréhension orale, l'expression orale, l'interaction orale, la compréhension écrite et l'expression écrite. La motivation de l’apprenant pour communiquer est aussi amplifiée par des contacts directs et authentiques que le professeur favorise. L’innovation pédagogique dans le domaine des langues est à encourager. Le CECRL propose un outil de politique linguistique transversal aux langues.

Le Socle commun de connaissances et de compétences précise les objectifs de l’école élémentaire et du collège ; il fournit un principe d'organisation des enseignements, en proposant des liens entre les disciplines et les programmes. Il permet ainsi de donner  du sens à la culture scolaire fondamentale, en se plaçant du point de vue de l’élève. L'ensemble des enseignements sont mis au service de l'acquisition du socle commun. Chaque compétence requiert la contribution de plusieurs disciplines et, réciproquement, une discipline contribue à l’acquisition de plusieurs compétences. La communication dans une langue étrangère est l’une des huit compétences clés du socle. Toutes les disciplines enseignées à l'école et au collège ont un rôle à jouer dans l'acquisition du socle, y compris l'éducation physique et sportive, les arts plastiques et l'éducation musicale, de même que l'éducation artistique et culturelle.