Textes à méditer : Pauvreté
Temps de lecture : 20 minutes
Je sais ; Refus de la misère ; Un vrai cadeau ; La fillette aux vieux os ; Un bricoleur de génie ! ; Je suis né chez toi ; L’autre devant moi ; Cri de pauvre : Vous devez nous respecter ; Quand j’avais faim
Je sais
JE SAIS,
que si les hommes par milliers meurent de faim,
tandis que d'autres au même instant meurent de trop manger,
c'est que nous n'avons pas su partager le blé,
et pétrir le pain pour nos frères humains.
JE SAIS,
que si tant et tant de jeunes éclatent de violence,
voulant prendre de force ce dont ils ont été privés,
c'est qu'ils sont nés par erreur, au hasard d'une étreinte,
ou voulus comme poupée par des parents-enfants,
après l'automobile et le petit chien.
JE SAIS,
que si des hommes ne voient que signes noirs et muets, sur les pages du livre,
c'est que certains gardent le savoir pour eux, comme un don réservé.
JE SAIS,
que si la terre est propriété et profit pour quelques-uns,
alors qu'elle n'est que chantier de travail et de peine pour la multitude,
c'est que les hommes ont oublié que la terre est à tous, et non pas au plus fort.
JE SAIS,
que si certains hommes il est vrai, sont plus riches
d'intelligence, de santé, de courage, que d'autres,
leurs richesses sont une dette envers les démunis,
mais je sais aussi que trop souvent cette dette s'accroît, sans être remboursée.
JE SAIS,
que si des millions d'hommes vivent sans qu'ils puissent, libres et responsables,
prendre leur place dans la construction du monde,
c'est quelques-uns se croient nés pour être maîtres,
et qu'il leur faut des esclaves pour pouvoir le rester.
JE SAIS,
que si des milliers des prisonniers agonisent dans des camps,
ou hurlent sous la torture,
c'est que des hommes se font propriétaires de vérités,
et qu'ils tuent lentement les corps pour que meure la pensée.
JE SAIS,
aussi, et j’admire, que des hommes partout se dressent courageux,
et debout, jettent leur corps saignant dans les luttes pour la justice et pour la paix,
mais je sais aussi que d'un corps qui combat, sans un coeur qui bat, ne peut naître la victoire,
car les luttes sans amour sont des luttes en vain,
le sang qu'elle font couler appelle un autre sang….
Michel Quoist
Refus de la misère
Pour ces millions d’enfants tordus par les douleurs de la faim,
n’ayant plus de sourire, voulant encore aimer.
Pour ces millions de jeunes qui, sans raison de croire, ni d’exister,
cherchent en vain un avenir en ce monde insensé.
Toi notre Père nous te prions envoie des ouvriers pour faire ta moisson.
Pour ces millions d’hommes, de femmes et d’enfants
dont le cœur à grands coups bat encore pour lutter.
Dont l’esprit se révolte contre l’injuste sort qui leur fut imposé.
Dont le courage exige le droit à l’inestimable dignité.
Toi notre Père nous te prions envoie des ouvriers pour faire ta moisson.
Pour ces millions d’enfants, de femmes et d’hommes
qui ne veulent pas maudire mais aimer et prier, travailler et s’unir,
pour que naisse une terre solidaire.
Une terre, notre terre, où tout homme aurait mis
le meilleur de lui-même avant que de mourir.
Toi notre Père nous te prions envoie des ouvriers pour faire ta moisson.
Pour que tous ceux qui prient trouvent écho près de Dieu
et reçoivent de lui la puissance d’écarter la misère
d’une humanité dont l’image est la sienne.
Toi notre Père nous te prions envoie des ouvriers pour faire ta moisson.
Joseph Wresinski
Un vrai cadeau
Un jour où je descendais la rue, un mendiant vint vers moi et me dit :
« Mère Teresa, tout le monde te fait des cadeaux ; moi aussi, je veux te donner quelque chose.
Aujourd'hui, je n'ai reçu que 29 centimes et je veux te les donner. »
Je réfléchis un moment : si je prends ces 29 centimes, il n'aura rien à manger ce soir,
et si je ne les prends pas, je lui ferai de la peine...
Alors, j'ai tendu les mains et j'ai pris l'argent.
Jamais sur aucun visage, je n'ai vu autant de joie que sur celui de cet homme, tellement heureux d'avoir pu faire un don !
C'était un énorme sacrifice pour lui qui avait mendié toute la journée au soleil cette somme dérisoire dont on ne pouvait rien faire.
Mais c'était merveilleux aussi, car ces piécettes auxquelles il renonçait pour moi devenaient une fortune, puisqu'elles étaient données avec tant d'amour.
Mère Teresa
La fillette aux vieux os
Elle ramassait les vieux os.
Elle ne savait ni lire ni écrire.
Elle n’avait même pas fait sa première communion.
Elle ignorait le catéchisme, car sa famille trop pauvre,
en avait besoin pour chercher le bois en forêt
et pour garder les trois autres à la maison.
Maison, c’est une façon de parler car, après cent misères,
leur logis n’était justement qu’un cachot désaffecté tant il était insalubre :
les quatre enfants habitaient ce cachot avec la mère et le père.
Ce père, afin de laisser aux siens un peu de pain,
demeurait parfois au lit pendant les heures du jour
pour supporter en silence la faim canine qui le tenaillait.
Jean-Marie, le plus jeune des enfants,
fut un jour surpris à l’église
grattant les bavures de cire des cierges pour apaiser sa faim.
C’est de ce « bouge infect et sombre » que cette gamine
sortit un matin pour aller vers la forêt chercher du bois,
et quelques os, pour les revendre à Alexine Baron, la chiffonnière du pays.
Elle revint au cachot avant midi les mains vides,
mais avec une richesse à faire accourir le monde entier.
J’oubliais, en effet, de vous préciser que cette fille sans première communion
s’appelait Bernadette Soubirous.
Et le monde entier accourt, depuis plus de cent ans, vers la grotte
et visite inlassablement le cachot « infect et sombre »
où l’enfant rentra sagement après chacune des dix-huit conversations
face à face avec Marie, Mère du Christ.
Ainsi, pour déclencher un tel torrent de ferveur et de curiosité,
pour révéler un tel Message, la Mère de Dieu a choisi l’enfant la plus misérablement pauvre de cette pauvre bourgade !
Comment est-il possible d’arriver à Lourdes sans être saisi et bouleversé par ce geste du Ciel
mettant le doigt sur la misère personnifiée : cette fillette ramassant les vieux os.
Mgr Jean Rodhain
Un bricoleur de génie !
Dieu est un bricoleur de génie :
Avec un couple stérile, Abraham et Sara, il engendre tout un peuple.
Avec un bègue, Moïse, il en fait "le" prophète de tous les temps.
Avec un petit berger, David, il anéantit les tyrans.
Avec un homme trompé, Osée, il crie sa fidélité.
Avec une femme légère, il évangélise la Samarie.
Avec des lâches, il invente les apôtres.
D'un rénégat, il fait le premier pape.
D'un chef de commando d'extermination de chrétiens,
il fait Paul, l'amoureux de Dieu.
D'un blouson doré, bourré d'argent et de vanité,
il nous fait un François d'Assise.
Dieu choisit ce qui est faible pour confondre la sagesse des sages.
Heureux celui qui croit que chaque être humain, même le plus vil,
est invité à partager l'intimité de Dieu pour toujours.
Stan Rougier
Je suis né chez toi
Je suis né nu, dit Dieu,
Pour que tu saches te dépouiller de toi-même.
Je suis né pauvre,
Pour que tu puisses me considérer comme l'unique richesse.
Je suis né dans une étable,
Pour que tu apprennes à sanctifier tout lieu de vie.
Je suis né faible,
Pour que tu n'aies jamais peur de moi.
Je suis né par amour,
Pour que jamais tu ne doutes de mon propre amour.
Je suis né de nuit,
Pour que tu croies que je puisse illuminer toute réalité.
Je suis né une personne comme toi,
Pour que tu n'aies jamais à te plaindre d'être toi-même.
Je suis né homme,
Pour que tu puisses être « Dieu ».
Je suis né dans la simplicité,
Pour que tu évites d'être compliqué.
Je suis né pour donner la vie, dit Dieu,
Pour emmener tout le monde à la maison du Père.
Je suis né chez toi…
Armand Guézingar
L’autre devant moi
Voici l’autre devant moi, Seigneur.
Je dois le regarder « lui »
Au-delà de ma sympathie
Ou de mon antipathie,
Au-delà de mes idées et de ses idées,
De mon comportement
Et de son comportement
Je dois « lui » permettre
D’exister devant moi,
Tel qu’il est en son être profond
Et non pas l’obliger à l’attaque,
A la défensive, à la comédie.
Je dois le respecter, autre que moi,
Et non pas le saisir, pour moi,
Le gagner à mes idées
L’entraîner à ma suite,
Je dois être pauvre devant « lui »
Ne pas l’écraser ou l’humilier
Ni l’obliger à la reconnaissance.
Car il est unique, Seigneur,
Et donc riche, d’une richesse que je ne possède pas,
Et c’est moi le pauvre
Qui me tiens à sa porte, nu, dépouillé
Pour apercevoir, au fond de son cœur
Ton visage,
Ô Christ ressuscité
Qui m’invite et me sourit.
Michel Quoist
Cri de pauvre : Vous devez nous respecter
Vous devez nous respecter, nous, que vous voulez écarter et dominer.
Ce faisant, vous trouverez vous-même
ce que vous avez de plus riche enfoui en vous
et que malheureusement vous ignorez encore :
votre dignité qui vous permettra de reconnaître la nôtre…
Vous pouvez nous frapper, nous pourchasser,
nous mépriser, nous emprisonner et même nous tuer.
Mais vous ne pouvez pas assassiner
notre dignité d'hommes et de femmes libres.
Nous savons d'ailleurs que votre recours à la force
démontre votre faiblesse, révèle vos failles humaines.
Nous ne vous en voulons pas,
nous voulons simplement que vous aussi,
vous découvriez le chemin de crête de la montée humaine
qui élève tous les hommes et toutes les femmes du monde,
quelles que soient leur couleur, leur croyance
et même quelles que soient leurs erreurs…
Nous sommes tous frères,
marchant vers les mêmes fins,
par-delà nos vies,
par-delà notre mort.
Nelson Mandela
Quand j’avais faim
Quand j'avais faim, tu m'as donné à manger.
Quand j'avais soif, tu m'as donné à boire.
Ce que vous ferez au plus petit des miens,
c'est à moi que vous le ferez, a dit Jésus.
Maintenant, entrez dans la maison de mon Père.
Quand j'étais sans logis, tu as ouvert tes portes.
Quand j'étais nu, tu m'as donné ton manteau.
Quand j'étais las, tu m'as offert le repos.
Quand j'étais inquiet, tu as calmé mes tourments.
Quand j'étais petit, tu m'as appris à lire.
Quand j'étais seul, tu m'as apporté l'amour.
Quand j'étais en prison, tu es venu dans ma cellule.
Quand j'étais alité, tu m'as donné des soins.
En pays étranger, tu m'as fait bon accueil.
Chômeur, tu m'as trouvé un emploi.
Blessé au combat, tu as pansé mes plaies.
Cherchant la bonté, tu m'as tendu la main.
Quand j'étais noir, ou jaune, ou blanc,
insulté et bafoué, tu as porté ma croix.
Quand j'étais âgé, tu m'as offert un sourire.
Quand j'étais soucieux, tu as partagé ma peine.
Tu m'as vu couvert de crachats et de sang.
Tu m'as reconnu sous mes traits en sueur.
Quand on se moquait, tu étais près de moi,
et quand j'étais heureux, tu partageais ma joie.
Rends-nous dignes, Seigneur,
de servir nos frères qui, à travers le monde,
vivent et meurent dans la misère et dans la faim
Donne-leur par nos mains leur pain quotidien,
et par notre amour la paix et la joie.
Mère Teresa
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