Marie dans les religions
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Marie occupe une place bien particulière au coeur des religions. En découvrir la richesse permet de mieux comprendre ce qui aujourd’hui encore fait l’objet d’une culte à Marie, mère de Jésus.
Dans la Bible
Dans l’Ancien Testament,
la figure de la Vierge apparaît déjà : « La Vierge concevra et enfantera un fils » (Isaïe 7, 14 ; Michée 5, 2-3).
Dans le Nouveau Testament
C’est Luc qui en dit le plus. Son Evangile commence par la naissance miraculeuse de Jean-Baptiste, annoncée par l’ange Gabriel qui se rend ensuite près de Marie pour lui dire qu’elle va avoir aussi un enfant, comme sa cousine Elisabeth. Ensuite, dans l’évocation de la naissance et des premiers mois du Christ, Marie joue le premier rôle, Joseph reste dans l’ombre.
Marc ne mentionne Marie que de façon très occasionnelle.
Matthieu, dans sa généalogie qui ouvre son Evangile, s’intéresse à Joseph ; il précise simplement que Marie se trouve enceinte par le fait de l’Esprit-Saint. Joseph tient le rôle principal : il pense à répudier Marie, c’est à lui que l’ange apparaît pour lui expliquer la situation et lui dire de donner le nom de Jésus à l’enfant.
Dans l’Evangile de Jean, deux moments-clés de la présence de Marie : aux noces de Cana et au pied de la croix. A Cana, Marie invite les serviteurs à agir sur la parole de Jésus : « Faites tout ce qu’il vous dira ». Et avant de mourir sur la croix, Jésus confie sa mère à l’apôtre Jean.
Ajoutons encore la présence de Marie au milieu des disciples réunis le jour de la Pentecôte (Actes des Apôtres).
Dans l’Eglise catholique
Le dernier chapitre de la Constitution dogmatique de Vatican II (« Lumen Gentium ») met en lumière la place et le rôle de Marie dans la vie de l’Eglise.
Honorée comme Mère de Dieu (Théotokos) et du rédempteur, elle occupe une place unique dans l’Eglise catholique. Et le Concile invite à un culte à Marie qui respectera cette dignité de Mère de Dieu, évitant « toute parole ou tout geste susceptibles d’induire en erreur, soit nos frères séparés, soit tout autre personne, sur la véritable doctrine de l’Eglise » qui affirme la prééminence du Christ.
Pour en savoir plus : voir le dossier Marie sur le site croire.com.
Pour les protestants
Sans être objet de culte, Marie est, pour les protestants, un témoin admirable par son oui à Dieu. Les protestants n’ont pas de culte des saints ni donc de culte à Marie. Mais dans les différentes branches du protestantisme (luthériens, pentecôtistes, etc…), il y a toutes sortes de manières de considérer Marie.
Les plus fervents sont les luthériens. Luther a su insister sur la naissance originale du Christ et sur Marie, mère du Seigneur. En 1521, il publie un Magnificat, commentaire du cantique évangélique, un des plus beaux textes écrits sur Marie.
Du 16ème au 19ème siècle, c’est le silence des protestants à propos de Marie. Ils n’acceptent pas les dogmes de l’Immaculée Conception (1854) et de l’Assomption (1950) mais reconnaissent la grandeur de Marie comme servante. Marie est fille de la terre avant d’être reine du ciel : elle a vécu le poids de la condition humaine avant d’être reine des anges.
De 1991 à 1997, théologiens catholiques et protestants réfléchissent ensemble sur le thème de la Vierge Marie. Voir Protestants et catholiques en dialogue.
Pour les orthodoxes
Dans la tradition de l’Eglise orthodoxe, la Vierge est étroitement associée au Christ, que ce soit dans la liturgie ou sur les icônes, rappelant qu’elle est la mère de Dieu. C’est elle aussi – en tant que figure de l’Eglise- qui présente à son fils la prière des pécheurs.
La place de Marie est très importante dans la tradition orthodoxe et inséparable de son fils. Ainsi dans les prières liturgiques, il y a toujours une invocation à la Vierge. Cette façon de souligner la présence de celle qui fut la mère de Dieu est un rappel du dogme du concile de Chalcédoine (451) qui affirme la double nature du Christ : Dieu et homme. Ainsi Marie n’est pas seulement la mère de l’homme-Jésus, mais la mère du Dieu-homme.
Sur les iconostases, ces sortes de cloisons décorées d’images, d’icônes, qui, dans les églises orthodoxes séparent la nef du sanctuaire, la Vierge Marie figure à gauche, son fils à droite. Et le célébrant en entrant s’incline tour à tour devant chacun d’eux.
Dans leur façon de s’adresser à Marie, les orthodoxes ont quantité de prières dont les paroles expriment la proclamation de la foi orthodoxe : « Toi, véritablement mère de Dieu ». A la place de la récitation du chapelet, ils utilisent la prière du cœur où l’énonciation du nom de Jésus équivaut à celui de Marie. Ajoutons aussi l’hymne acathiste propre à l’orthodoxie (proclamation debout d’odes très lyriques et très belles) et les fêtes mariales qui ponctuent l’année liturgique.
Et les représentations iconographiques de la Vierge Marie, chez les orthodoxes ?
Elles nous sont devenues familières par les icônes qui ornent nos propres demeures ou auxquelles nous faisons appel dans telle ou telle célébration.
En voici les principales :
- La Vierge de tendresse : joue contre joue, le petit bras de Jésus entourant le cou de sa mère. Deux amours se rejoignent. Le fils donne l’impression de consoler sa mère. Le regard de la mère se perd dans le lointain, douloureux comme si déjà, elle pressentait l’ombre de la croix.
- La Hodigitria est « celle qui montre le chemin ». Marie tient son enfant d’un bras, de l’autre elle désigne celui qui a dit : « Je suis le chemin ». Jésus, de sa main droite bénit, dans sa main gauche il tient le rouleau des Ecritures. Jésus petit enfant est déjà Dieu venu apporter un message et accomplir une mission.
- La Vierge du signe : c’et la représentation de la prophétie d’Isaïe : « Je vous donnerai un signe ». Sur sa poitrine, la Vierge porte un médaillon où s’inscrit le Fils.
- La Déisis (ce qui veut dire supplication) : le Christ est assis sur un trône, un livre ouvert sur les genoux. A l’arrière-plan, à droite Marie en orante intercède ; à gauche, saint Jean-Baptiste. Tous deux intercèdent pour les péchés de toute l’humanité.
Sur sitEColes : les icônes.
En Islam
Marie occupe une place de choix dans l’Islam. Elle n’est pas une femme comme les autres ; selon le Coran, elle est un exemple de prière, de soumission à Dieu, de sainteté.
Ce statut exceptionnel, unique même de Marie, nous amène à nous interroger sur la différence avec le dogme chrétien.
Pour nous y retrouver, quelques repères :
- En Islam, Jésus n’est pas fils de Dieu. Né du souffle de Dieu, il est appelé l’Oint ou le Messie. Et Marie n’est pas appelée la « mère de Dieu ». Jésus est appelé « fils de Marie » par le Coran. Jésus et Marie constituent « des personnages parmi les prophètes ».
- Marie représente la femme parfaite, la servante du Seigneur dans toute son acception. Comme les prophètes qui reçoivent la parole de Dieu sous forme d’un message, elle reçoit cette parole dans sa chair, sous une forme humaine.
- Marie est aussi la femme priante. Elle est exemple de prière, de soumission à Dieu et de sainteté, modèle pour les hommes et pour les femmes. Mais les musulmans ne prient pas Marie car chez eux on ne prie que Dieu et on lui demande de « prier sur » le prophète, de le bénir. Les saints n’intercèdent pas comme dans la tradition chrétienne. Mais le Prophète joue le rôle d’intercesseur.
À la suite du Coran, la tradition musulmane s’est intéressée à la vie de Marie, en reprenant certains épisodes des Evangiles apocryphes ou en s’interrogeant sur la place exacte de Marie par rapport à d’autres femmes de l’Islam comme Khadîja, la première épouse du prophète, ou Fatima, sa fille. Certains sanctuaires mariaux, comme Notre-Dame d’Afrique à Alger, sont d’ailleurs fréquentés par les musulmans.