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J'ai un élève daltonien dans ma classe.

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J'ai un élève daltonien dans ma classe.

Le daltonisme touche 8% des garçons et 0,4% des filles. Il n’est pas détecté systématiquement. Pourtant, il peut avoir des conséquences sur la scolarité des élèves qui en sont atteints.

1. Le dépistage


Le daltonisme touche 8 % des garçons et 0,4 % des filles. Il n’est pas systématiquement détecté lors des visites chez les ophtalmologistes, et, dans nos établissements d’Enseignement catholique, les visites des médecins scolaires sont rares. Il est donc probable qu’il existe dans la plupart des établissements des élèves daltoniens non repérés. A titre d’exemple, l’école Saint Joseph Carnoles a organisé, avec l’aide de l’association des parents d’élèves, le dépistage du daltonisme : cela a permis de découvrir que 12 garçons sur 183 étaient probablement daltoniens alors que, pour 11 d’entre eux, leurs parents l’ignoraient. En revanche, aucune fille n’était daltonienne. Cela confirme les statistiques nationales.
 
Le dépistage se fait à l’aide du test d’Ishihara. La personne testée doit dire si elle peut lire les chiffres dissimulés dans un dessin composé de boules multicolores. En fonction des couleurs utilisées, certains chiffres seront visibles par tous, d’autres seront lus de façon différente par les daltoniens et les non daltoniens, d’autres seront visibles uniquement pour les non daltoniens, d’autres encore ne seront visibles que par les daltoniens.
 
Le test d’Ishihara est extrêmement facile d’utilisation, mais il n’est accessible qu’auprès des ophtalmologistes. Toute école désirant organiser le dépistage du daltonisme doit donc s’assurer du concours d’un professionnel. De plus, toute suspicion de daltonisme née suite à un dépistage en milieu scolaire devra être confirmée et affinée lors d’un rendez-vous chez un ophtalmologiste.
 
2. Qu’est-ce que le daltonisme ?

Le daltonisme est un défaut de la perception des couleurs d’origine génétique. Les femmes en sont rarement atteintes mais 15 % d’entre elles sont porteuses du gène et peuvent donc transmettre le daltonisme à leurs enfants.
 
Le daltonisme ne se corrige pas et ne se guérit pas.
 
Il y a différentes variantes de daltonisme :
- la vision en noir et blanc (rare),
- la confusion entre le jaune et l’oranger,
- la confusion entre le rouge et le vert.
 
Contrairement à ce que l’on croit souvent, les daltoniens n’inversent pas les couleurs. Ils ne voient pas le rouge en vert et le vert en rouge mais perçoivent ces deux couleurs de la même façon, ce qui les empêche de les distinguer.

3. Le daltonisme et l’école
 
On n’apprend pas les couleurs : on les reconnaît et on leur donne un nom. Le problème, pour un daltonien, c’est qu’il a l’impression qu’il existe deux noms différents pour la même couleur. Or, le vocabulaire des couleurs est presque toujours l’un de ceux qui est enseigné en premier en petite section. Les enseignants y attachent une grande importance et les élèves le perçoivent. Les élèves daltoniens peuvent donc se trouver déstabilisés et perdre confiance en eux dès le début de leur scolarité car, sans que leur intelligence ou leur volonté soient en cause, ils se trouvent une fois sur deux en situation d’échec lorsqu’il s’agit de nommer certaines couleurs, sans être en mesure de comprendre pourquoi.  
 
Très souvent, les daltoniens compensent :
- Ils mémorisent : le sang est rouge, les feuilles sont vertes, les cerises sont rouges, il existe des pommes rouges et des pommes vertes…
- Ils utilisent d’autres indices que la couleur. Le principal est la position : sur une télécommande, ils repèrent les boutons à leur position et non à leur couleur ; ils savent que le feu rouge est en haut et le feu vert est en bas, etc. Ils utilisent également toutes sortes d’autres indices : par exemple, ils identifient leur bic rouge à sa marque ou à son usure, ils reconnaissent la voiture de leurs parents non à sa couleur mais à sa marque…
- Ils prennent des choix sans risque, par exemple pour s’habiller.
- Ils évitent les jeux de société auxquels l’on joue avec des pions de couleur (Mastermind…).
 
Les daltoniens peuvent donc accomplir toute leur scolarité sans être détectés. Cela ne veut cependant pas dire que leur daltonisme ne leur pose aucun problème à l’école.

4. J’ai un daltonien dans ma classe, que dois-je faire ?
 
La loi de 2005 sur le handicap impose aux enseignants d’adapter dans la mesure du possible toutes les situations pouvant placer un élève en situation de handicap. Or, le daltonisme est un handicap, léger, certes, mais qui ne peut être ni guéri ni corrigé.
 
La première chose à faire est de se renseigner sur la nature du daltonisme de l’élève : quelles sont les couleurs concernées ?
 
Sachant cela, il s’agit d’adapter toutes les situations qui mettent en jeu ces couleurs. Voici quelques exemples :
- Ecrire le nom des couleurs sur les crayons, feutres, bics, tubes de peinture. En maternelle, utiliser des symboles distinctifs. Penser à marquer également le matériel collectif.
- Si le daltonisme porte sur les couleurs rouges et vertes, ne pas exiger que les corrections soient faites en vert. Ne pas reprocher à l’élève d’avoir utilisé le rouge, « couleur de la maîtresse »…
- Ne pas demander de souligner le groupe sujet en vert et le verbe en rouge.
- Ne pas faire de reproches si un dessin est mal colorié, en particulier en maternelle (arbre colorié en rouge, par exemple).
- Eviter les contraintes liées aux couleurs dans les consignes en art plastique.
- Adapter les cartes de géographie : distinguer les différentes zones par des hachures, des étoiles, etc., plutôt que par des couleurs.
- Adapter la légende des croquis.
- Eviter les coloriages magiques ou les adapter.
- En EPS, ne pas donner à une équipe des maillots verts et à l’autre des maillots rouges.
- Vérifier les consignes et les légendes données dans les fichiers.
- Analyser chaque situation d’apprentissage afin de vérifier que les couleurs ne sont pas en jeu… on ne pense pas spontanément que confondre le rouge et le vert peut poser un problème pour construire un circuit électrique, par exemple.
 
Il faut également penser à prévenir les intervenants, en particulier ceux de langues vivantes. En effet, le vocabulaire des couleurs est le plus souvent celui qui est enseigné en premier. De plus, il est souvent demandé d’entourer ou de colorier des dessins de différentes couleurs pour vérifier la compréhension orale ou écrite.
 
Enfin, l’idéal est de prévoir que l’élève daltonien pourra demander de l’aide à son voisin s’il rencontre une difficulté liée aux couleurs. Cela sera nécessaire si, par exemple, une carte de géographie n’a pas pu être adaptée car elle se trouvait dans un livre ou sur Internet…ou si l’enseignant n’a pas réalisé que la situation nécessitait une adaptation.
 
Idéalement, un Projet d’Accueil Individualisé (PAI) sera rédigé pour lister les adaptations proposées.

5. Le daltonisme et la famille
 
Il est bien sûr nécessaire de mettre les parents des élèves daltoniens au courant des adaptations mises en place à l’école. Le  PAI sera utile pour cela.

"Lorsque le dépistage en milieu scolaire révèle une suspicion de daltonisme, au moment de l’annoncer aux parents, il ne faut pas oublier que le daltonisme est héréditaire. Si un élève est daltonien, Il est possible que son grand-père l’ait été aussi, parfois sans le savoir. Il peut être difficile pour ce grand-père de réaliser à l’âge adulte qu’il a été toute sa vie porteur d’un handicap, et que ce handicap a pu être source pour lui de difficultés scolaires. La famille risque de s’inquiéter d’autant plus pour l’enfant."

Il convient donc de prendre le temps du dialogue et de rassurer les parents sur l’avenir scolaire, voir professionnel de leur enfant. Leur proposer de rencontrer un adulte daltonien ou les parents d’un autre élève daltonien (un bon élève, si possible…) peut aussi s’avérer utile.

 

 
Crédit dessin Jack Kock site : www.dangerecole.blogspot.fr